LES CORMIERS FORESTIERS DU DEPARTEMENT DES VOSGES AUSSI RARES QUE DISCRETS...(3 rencontres).

Le cormier de Moriville (Vosges 88)

Le cormier (Sorbus domestica) est un arbre fruitier  dont on doit le nom scientifique  à Carl Von Linné en 1753.  Longtemps classé parmi les pyrus (poirier) sous l'appellation pyrus domestica, il est devenu rare  malgré ses nombreux usages et qualités pourtant reconnus depuis bien longtemps. A l'origine de l'humanité, notre instinct de survie nous a obligé à être des chasseurs-cueilleurs" découvrant les fruits des arbres sauvages. Au fil du temps, bon nombre d'entre eux ont été "domestiqués", cultivés, greffés, transformés et ainsi améliorés pour augmenter la diversité, la qualité et la productivité. Une majorité de ces arbres à fruits comestibles appartient à la famille des rosacées telles que les poiriers, pommiers, cerisiers, pruniers, pêchers ou abricotiers entre autres. Le cormier l'est aussi mais son fruit moins appétissant l'a sans doute rendu moins attractif et donc moins utilisé, oublié et rare... L'apparence étant devenue, de nos jours primordiale, primant sur l'essentiel le goût, il aura du mal à inverser la tendance... 

Espèce spontanée (qui pousse naturellement), le cormier est originaire du bassin méridional allant de l'Espagne jusqu'à la Turquie... Il s'est répandu et naturalisé ensuite  à travers toute l'Europe, cultivé et dispersé pour son utilité alimentaire. C'est surtout les Romains qui l'ont largement dispersé à travers notre "Gaule". Ses fruits, les cormes étaient à cette époque utilisées pour nourrir hommes et chevaux durant la longue période hivernale. Séchées après récolte, elles étaient consommées comme des pruneaux, incorporées dans le pain où utilisée en marmelade ou en confiture. Ce fruit, servait aussi à préparer des boissons fermentées à la manière du cidre, une sorte de cervoise, "le curmi" en Gaulois. On obtenait aussi à des degrés plus élevés d'alcool, une eau de vie en mettant à fermenter des cormes avant qu'elles ne deviennent blettes. On leurs attribue des vertus médicinales notamment contre les nausées et les diarrhées. (En manger trop provoque la constipation)...

Suivant sa situation géographique, le climat, le sol où il est enraciné, son environnement proche et bien d'autres facteurs, il peut rester arbustif ou atteindre de grandes dimensions. En port libre ou de plein vent  et sans concurrence autour de lui, il est le plus souvent court de tronc avec un houppier ample. Ces sujets isolés peuvent atteindre pour les plus âgés, 4 à 4,50 m de circonférence, souvent aussi large que haut. (Exemple : Ceux de Marmoutier 67440, celui  de Sarre-Union 67250 où de Merry la Vallée en Saône et Loire. 

En forêt et soumis à une sylviculture en leur faveur, ils peuvent atteindre 30 m de hauteur avec des longueurs de fut de 10 à 15 m pour des diamètres de 50 à 80 cm. Des sujets remarquables et isolés  dépassant les 200 ans ont été répertoriés. Celui de Commercy ou de Moriville pour ne citer qu'eux, classés et protégés par l'ONF font partie de ceux là. 

Autrefois, de nombreux cormiers ont été plantés dans nos campagnes surtout dans les haies et les boqueteaux. Entre 1960 et 1980, les projets économiques de remembrements intensifs ont conduit à l'arrachage massif des haies bocagères qui modelaient si bien le paysage. Composées de plantes herbacés, d'arbustes et d'arbres de haut jet, elles constituaient un réservoir d'une riche diversité végétale et animale D'une utilité avérée, on en replante de nouveau... Le cormier comme d'autres végétaux  sont intentionnellement associés avec les cultures et les prairies d'élevage. En les intégrant dans les terres agricoles, les intérêts sont économiques et environnementaux. Certaines communes de France les utilisent en reboisement forestier, en alignement et en plantation ornementale... Avec le changement climatique, son adaptation à la sécheresse est un atout majeur : Disposant de moins d'eau l'été, il est capable de réguler la circulation de ses liquides nourriciers en diminuant la taille de ses vaisseaux conducteurs. La pression étant augmentée, le flux est meilleur sur toute sa hauteur. Il peut idéalement remplacer d'autres ligneux qui ne sont plus dans leur niche écologique.  

Si sur pied, ses qualités esthétiques à toutes saisons ne sont plus à démontrer, coupé et scié, son bois magnifiquement coloré dur et lourd  était utilisé déjà bien avant l'arrivée de la fée électricité : Les roues d'engrenage des moulins étaient équipées de dents (les alluchons*) en bois de cormier. Sa masse volumique importante de 800 à 950 kg/m3 et son poli extraordinaire, le classe parmi les meilleurs bois dit "d'usure", notamment dans la confection des outils de corroyage (rabot, varlope...) Dénommé au 18éme siècle "l'ébène d'Europe", on le retrouve bien évidemment en ébénisterie en placage et en marqueterie... En foresterie, il fait partie des "bois précieux" tout comme le merisier ou l'alisier torminal...

En continuant la lecture de ce reportage, découvrez en images ces cormiers d'exception. Je vous invite à consulter ces sites où le cormier est détaillé avec beaucoup de détails enrichissants...

https://www.associationcormier.fr/le-cormier

https://www.sepenes.fr/le-cormier

   

folioles dentés seulement sur les 2/3 de la longueur...( feuille qui se délite facilement ).

  La feuille caduque de plus de 20 cm de long est composée de 9 à 21 folioles (imparipennée),oblongues, dentées sur les 2/3 de leur longueur dont la mesure totale varie de 6 à 10 cm. Glabre dessus comme dessous une fois adulte, sa couleur d'automne, varie du rouge au cuivre, le rendant remarquable au niveau ornemental. Souvent confondu avec le sorbier des oiseleurs (sorbus aucuparia), la différenciation se fait notamment au niveau de la denture des feuilles qui, pour ce dernier, est sur sa totalité... A noter qu'une fois au sol, la feuille du cormier se délite rapidement, lui donnant un avantage non négligeable sur d'autres essences, pour les plantations d'allées ou d'alignements...

   

Rameaux de cormier

  

Les cormes de la forme d'une petite pomme...

2 sortes de forme principale : Pomifera, se rapprochant de la forme d'une pomme et purifera, plus allongée ressemblant à la poire... Dans le sud de la France, on lui préfère le nom de "sorbe". Comestible après blettissement, on l'utilise pour la confection de pain de cormes, confiture, cormé liqueurs, eau de vie...        " L'alise et la corne et la nèfle, roussettes que le soleil ne mûrit pas mais que novembre attendrit". (Phrase de Colette dans un de ses écrits de 1936).

 

Ecorce d'un gris foncé qui s'écaille en petits carrés. Elle se fissure horizontalement se confondant  facilement avec celle d’un chêne.

 Cormier sur le coté droit d'un chêne (forêt communale de La Neuville sous Montfort 88). Difficile de l'identifier...

Les 3 photos suivantes : le cormier de Sarre-Union 67260 photographié le 15 janvier 2014, hélas disparu... 

Situé le long de la rue de la gare à Sarre-Union, ce cormier montre la forme caractéristique des sujets en port libre : un houppier ample sur un tronc court. Jamais concurrencé par d'autres arbres, il s'est expansé en largeur, occupant l'espace pour capter le maximum de la lumière indispensable à son développement. Le cormier est une essence héliophile.

Circonférence : 3,50 m, diamètre : 111 cm.

La fin du cormier de Sarre-Union (ci-dessous)

  

 Le cormier de Sarre-Union n'est hélas plus visible. Il a été démonté et enlevé en janvier 2017. Situé rue de la Poste, il aurait mérité beaucoup plus d'attention... ( photo internet du journal Le Républicain Lorrain).

Voici le cormier de la FC de Circourt (88270)

La fléche rouge représente le petit parking où il faut laisser son véhicule. La ligne en violet représente un périmètre forestier aborné. Suivre ce dernier par la droite sur la carte jusqu'à la borne 46, le cormier est là !

Légèrement caché par la végétation qui pousse à son pied. 

Cormier de la forêt communale de Circourt

 circonférene : 1,98 m, diamètre : 63 cm

très aérien

Blessure coté opposé au périmètre 

Panneau au bord du périmètre

 Le périmètre au départ de la route

Borne de périmètre n° 46, le cormier derrière. 

Voici le cormier de Moriville (88330).

 Circonférence : 2,31 m, diamètre : 73 cm.

 

L'entrée du sentier qui mène au cormier quand vous quittez la tranchée du Torlot. 

 Le troisième : le cormier de Rouvres en Xaintois.

La fléche rouge indique la position du cormier qui est visible depuis la tranchée forestière, celui ci est cerclé en bleu...

Circonférence : 1,92 m, diamètre : 61 cm.

Une essence oubliée à redécouvrir...

La tranchée forestière qu'il faut emprunter sur une soixantaine de m, le cormier est sur la droite à environ 20 m à l'intérieur du bois... 

le cormier de Rouvres en Xaintois le 29 août 2013.

29/08/2013. (Rouvres en Xaintois)

Voici le cormier de Commercy (55)

arbre qui aime la lumière, il est héliophile...

Circonférence : 2,49 m, mesurée à 1,30 m de haut le 04 mars 2022. En port forestier, le cormier peut atteindre un "tronc commercial" de 10 à 15 m.

Presque 80 cm de diamètre !

 Juillet 2009, sylviculture (dégagement de plantation (merisiers, alisiers et cormiers...) Mise en place de protections. FC Laneuveville sous Monfort, 88.

 * Un alluchon (anciennement alichon) est un bloc de bois rectangulaire avec une tête et une queue effilée, similaire aux dents d'un engrenage. Source Wikipédia, photo et phrase).